Le Training AutogEne
Méthode de relaxation par auto-décontraction concentrative
(Konzentrative Selbstentspannung)
Histoire
Johannes Heinrich Schultz, psychiatre, neurologue et psychothérapeute allemand, développa au cours des années 1926-1932 la méthode du training autogène. La conception de la méthode remonte aux années 1908-1912 lors desquelles il portait son attention sur les travaux de Oskar Vogt sur l’hypnose.
Vogt avait constaté que certaines personnes « cultivées et critiques » avaient la possibilité d’entrer dans l’état particulier d’hypnose, réalisant ainsi une « auto-hypnose ». Il avait remarqué une augmentation des possibilités d’auto-observation de ses patients dans cet état volontairement provoqué. En plus, en période de crise physique ou psychique, il était possible d’induire un état de calme et de détente, ce que Vogt appelait « un repos prophylactique ».
Cependant les inconvénients de l’hypnose n’échappèrent pas à certains thérapeutes du 19ème siècle : passivité et dépendance du patient de son thérapeute. C’est dans la tentative de dépassement de ces difficultés que J. H. Schultz va élaborer la méthode du training autogène.
Le client s’approprie cette méthode par un entrainement personnel, se l’applique à lui-même et peut ainsi la pratiquer à sa guise et devenir autonome.
Sur la base d’auto-observations les plus libres et complètes de ses patients, Schultz remarqua des similitudes concernant les sensations de lourdeur et de chaleur diffusante de leur corps, accompagnées de sensations de calme et de repos, et ceci indépendamment de la technique de l’hypnose employée.
Il considéra que tout processus de déconnection concentrative implique ces phénomènes physiologiques et les examina sous l’angle de la décontraction.
Schultz reconnut dans l’expérience de pesanteur, l’expression de la détente musculaire et dans celle de la chaleur, l’expression des modification vasculaires dans le sens d’une vasodilatation.
De ces observations il déduit le principe essentiel du training autogène :
Si le processus de décontraction s’opère spontanément au cours de l’hypnose il peut devenir l’objet d’exercices systématiques et « on peut s’attendre à ce que des exercices systématiques et corrects de décontraction amènent l’ensemble de la déconnection souhaitée». *
Conditions
Schultz détermina les conditions pour une véritable induction suggestive :
L’accord du sujet disposant d’une certaine maturité et d’une certaine autonomie et se trouvant dans une posture corporelle adéquate (assise ou allongée).
Il accorda beaucoup d’importance sur l’expérience de la concentration intérieure et du recueillement, favorisée par l’attention aux processus somatiques : « Concentré sur son vécu somatique, le patient pénètre ainsi dans les couches sensibles et émotionnelles de son moi corporel et se trouve alors amené sans contrainte vers une concentration intériorisante. » *
La technique du Training Autogène de Schultz consiste en une concentration mentale du client qui va diriger son attention successivement sur la perception de divers types de sensations corporelles et ainsi déclencher, par auto-entrainement, des modifications physiologiques du système neurovégétatif et des modifications psychiques de conscience.
Cycle infErieur
L’ensemble du travail se réalise en deux cycles. Les exercices du cycle inférieur permettent de développer des capacités de contrôle conscient sur différents processus physiologiques comme par exemple la respiration, le rythme cardiaque, la circulation sanguine, le métabolisme. De ce fait, cette méthode aide à réguler ses émotions et le stress et à se détendre.
Le cycle inférieur se développe en 6 étapes successives, où chaque nouvelle étape ne peut être intégrée qu’à la condition d’être précédée par l’étape antérieure, pleinement acquise par le client. Elles sont enseignées à des intervalles hebdomadaires ou bimensuelles.
Le sujet atteint une maîtrise de détente physique et psychique par la pratique quotidienne de 2 à 3 courtes séances de quelques minutes chacune, pendant 2 à 4 mois.
Chaque séance débute avec la mise en position (assise ou debout), la fermeture des yeux et l’induction au calme :
« Je suis tout à fait calme ».
1. étape : Expérience de la pesanteur
Concentration sur la sensation de pesanteur, de lourdeur des bras, des jambes et de tout le corps (généralisation). Chaque phrase est répétée 5 à 6 fois.
« Le bras droit/gauche est tout lourd », « La jambe droite/gauche est toute lourde », « Tout mon corps est lourd. »
Décontraction des muscles.
2. étape : Expérience de la chaleur
Concentration sur la sensation de chaleur, de lourdeur des bras, des jambes et de tout le corps (généralisation).
« Le bras droit/gauche est tout chaud », « La jambe droite/gauche est toute chaude », « Tout mon corps est chaud. »
Vasodilatation des vaisseaux périphériques.
3. étape : Contrôle du cœur
Concentration sur la région du cœur, le rythme cardiaque.
« Mon cœur bat calmement et régulièrement (puissamment) » – Régulation du rythme cardiaque.
4. étape : Contrôle respiratoire
Concentration sur la respiration, son rythme sans vouloir l’influencer d’aucune manière.
« Respiration calme », « Je suis toute respiration »
5. étape : Chaleur dans la région abdominale
Concentration sur la chaleur au niveau du plexus solaire (situé entre le bas du sternum et le nombril).
« Mon plexus solaire est tout chaud » ou mieux « inondé de chaleur », « La chaleur se répand dans le plexus solaire »
6. étape : La fraicheur du front
Concentration sur une sensation de fraicheur légère et agréable au niveau du front (symbole des affects).
« Mon front est agréablement frais. » – Vasoconstriction légère au niveau du front.
A la fin de chaque séance, la reprise se fait en 3 temps :
1. Mouvements vigoureux de flexion de l’avant-bras
2. Quelques respirations profondes
3. Ouverture des yeux
Cycle supErieur
Une fois les 6 exercices du cycle inférieur maîtrisés, le cycle supérieur peut être abordé.
Le sujet doit être en mesure de réaliser la déconnection spécifique du cycle inférieur d’une manière immédiate par un « bref acte de concentration intérieur ».
Schultz insiste sur le fait que ce cycle est réservé à des psychiatres expérimentés et ayant suivi une formation psychanalytique.
Il se déroule en 7 étapes :
1. Orientation des yeux vers le centre du front afin d’approfondir la déconnection autogène.
2. Laisser surgir dans son imagination une couleur uniforme quelconque, c’est la découverte de « la couleur propre ». Ensuite toutes les couleurs du spectre sont systématiquement envisagées avec les associations faites par le patient.
3. L’entrainement de la visualisation d’un objet choisi. Laisser apparaitre certains objets déterminés à l’intérieur de son champs subjectif (plus volontairement des objets concrets d’usage quotidien au début, puis des objets abstraits, comme la justice, le bonheur… avec leurs associations.)
4. Laisser se dérouler l’expérience le plus intensément souhaitée, c’est la découverte du « sentiment propre ».
5. Représentation d’une personne déterminée, aussi concrètement que possible – plusieurs relations affectives sont envisageables : positive, neutre, aversive ; c’est la « capacité d’interprétation affective » d’une personne.
6. La découverte des valeurs existentielles par des interrogations « internes » tout en observant les expériences qui surgissent et qui constituent en quelques sortes des « réponses de l’inconscient » (des formules interrogatives générales au début : « Quel est le sens de la vie ? Comment imaginer la mort, l’éternité, comment vivrais-je si je pouvais être autrement ? » … complétées par des questions individuelles)
7. Développer une formule intentionnelle, qui est brève, directe, positive et relative à l’objectif ; c’est la mise en formule d’une résolution qui correspond le mieux à la personnalité profonde du client. Elle oriente le client vers le mode de réalisation de son être qu’il estime le plus conforme à sa nature.
Schultz estima que la durée de maitrise complète de ce cycle est de 3-4 ans.
Il conseille au médecin qui s’intéresse à la méthode d’expérimenter « autant que possible, sur lui-même le caractère particulier et la portée de cette technique sous la direction d’un collègue expérimenté, jusqu’à ce qu’il en ait lui-même acquis une parfaite maîtrise.»*
Champs d'application
Schultz a pu montrer l’efficacité de sa méthode dans le traitement des troubles psycho-somatiques, comme les troubles gastro-intestinaux, les céphalées, les palpitations, l’hypertension, les états d’angoisse, les insomnies, les tremblements, les tics ou les dysménorrhées ou certains cas d’asthme. De bons résultats ont été obtenus dans la gestion du stress et pour la préparation aux examens, à l’accouchement et aux compétitions sportives.
Le training autogène a été repris et adapté par le Pr. Caycedo, fondateur de la Sophrologie et constitue une des bases de sa méthode.
Donnees bibliographiques
*DELAY, Jean (directeur) : J. H. Schultz, Le training autogène ; PUF, 1958
Dr. EBERLEIN, Gisela : Guide Pratique du training autogène ; Editions Retz, 1980
Christine Altdorf, Sophrologue, 2021